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 Until Death Do Us Apart [Ensel]

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MessageSujet: Until Death Do Us Apart [Ensel]   Until Death Do Us Apart [Ensel] EmptyMar 8 Déc - 3:47

Until Death Do Us Apart

Marriage happens as with cages: the birds without despair to get in, and those within despair of getting out.


La veille, Ayotunde avait tressé les cheveux d’Aisling pour la nuit avec un soin tout particulier, comme lorsqu’elle était enfant. Ash faisait semblant de lire un traité de théologie expérimentale pendant que sa mère nouait les mèches frisées entre ses doigts experts et leur appliquait une huile parfumée. Grimaçant parfois lorsque ses cheveux étaient tirés un peu trop rudement, elle relisait pour la cinquième fois une phrase sans la comprendre, tandis que Sol accrochait désespérément les petites griffes de ses ailes dans la fourrure d’Asmophomel, le dæmon lémurien d’Ayotunde. Celui-ci passait rapidement et inlassablement ses doigts contre le duvet soyeux de la gorge du chiroptère, leur cœur battant à l’unisson. Demain, Ash quitterait officiellement le monde de l’enfance pour entrer dans celui, parfaitement terrifiant, de la vie maritale. Au matin, elle devrait rencontrer pour la première fois son fiancé, au cours d’un rendez-vous arrangé et codifié par leur famille respective.

Mère, fille et dæmons étaient restées ainsi un long moment, en silence, partageant simplement ce dernier moment d’intimité familiale, puis Ash avait retiré sa robe et son corset pour enfiler une robe de chambre par dessus son jupon et sa blouse et s’était mise au lit, serrant son incompréhensible ouvrage comme si on avait voulu le lui arracher. Ayotunde l’avait embrassée sur le front avant de quitter la chambre, et elles n’avaient toujours pas échangé un mot, mais Sol tentait de retenir Asmo et celui-ci fut contraint de le détacher délicatement de son pelage. Dans un faible couinement de détresse, la chauve-souris était revenue se loger à sa place habituelle, dans le cou de son humaine, et leur mère avait fermé la porte.

Plus tard, Gorvenel était venu frapper sur le battant de bois, accompagné de son dæmon-lynx. Il s’était assis quelques instants au chevet de sa fille, ses yeux embués commodément dissimulés dans les ténèbres entourant le faible halo de la lampe à gaz. Demain, il devrait adopter cet air froid et policé qui faisait la réputation des Balshilek, mais pour ce soir, il pouvait encore affubler son enfant des sobriquets qu’il n’avait plus employé depuis près de 15 ans. Ash avait alors passé ses bras autour de son cou et il l’avait bercée doucement, comme quand elle était toute petite. Elle avait un peu pleuré, elle aussi, mais s’était essuyé les yeux lorsqu’il avait finalement rompu leur étreinte pour lui souhaiter bonne nuit. Elle s’était alors retrouvée seule avec Sol et son volume de théologie, sur lequel elle n’avait pas eu le cœur de se pencher à nouveau.

La nuit avançait à une vitesse vertigineuse, sans qu’elle ne parvienne à fermer l’œil en dépit des mots de réconfort chuchotés par son dæmon. Peut-être que ce ne sera pas si terrible, l’apaisait-il. Oui, on va devoir quitter la maison, mais qu’attend-on d’une femme mariée, après tout ? Qu’elle entretienne le foyer, et donc, qu’elle y reste. Tu prendras tes marques dans ta nouvelle demeure et ensuite tout sera plus facile. Ce n’était pas vraiment très rassurant : si Ash rechignait à se confronter au monde extérieur, elle n’en était pas pour autant une bonne ménagère. Médiocre, tout au plus, et qu’en penserait son futur époux lorsqu’il s’en apercevrait ?

L’angoisse de la personnalité du mari était passée au second plan face à celle d’abandonner la sécurité de son havre, mais elle avait fini par ressurgir avec les petites heures de la nuit. Et s’il était cruel, et s’il était aussi fou que les rumeurs le prétendaient, et s’il la forçait à assister et participer à ces fêtes tapageuses dont on le disait si friand ? À vrai dire, le seul ragot un tant soit peu tranquillisant était celui concernant la sexualité du fiancé. S’il préférait la compagnie des hommes, n’y aurait-il pas là un souci de moins à se faire ? C’était le seul point positif à toute cette regrettable situation, vraiment.

Épuisée et inquiète, Ash finit par plonger dans un sommeil agité, alors que le ciel menaçait déjà de s’éclaircir.

Au matin, la gouvernante dû la secouer pour qu’elle émerge, sans oublier de se lamenter bruyamment sur l’apparence de sa jeune maîtresse et des vilains cernes qui soulignaient ses yeux embrumés. Elle ne parvint pas à sortir de cette torpeur tandis qu’on l’habillait, la coiffait et la poudrait, petites mains agaçantes cherchant à lui donner un semblant d’allure pour la première rencontre. Et ce n’était pourtant qu’un début. Elle savait qu’elle passerait tout le début d’après-midi à se faire accoutrer et pomponner avec un zèle redoublé pour la cérémonie qui aurait lieu en tout début de soirée. Et enfin, la réception à proprement parler, avec tout ce monde, dans un hôtel particulier de Valcalme. Mais chaque chose en son temps.

L’esprit commençant tout juste à s’éclaircir, Aisling descendit au salon, houspillée par deux domestiques. Son visage était composé, mais Sol voletait en tous sens autour d’elle, trahissant son agitation, et le dæmon chien d’une des femmes de chambres dut menacer de le plaquer au sol, ce qui eut pour effet immédiat de le voir atterrir dans la chevelure d’Ash, entraînant de nouveaux cris d’orfraie et une retouche coiffure. Finalement, la jeune femme fut installée sur une chaise dure et inconfortable du petit salon – pour ne pas risquer de la voir s’avachir dans un fauteuil plus confortable. Et puis on attendit. Longtemps. Les minutes semblaient durer une éternité à Ash, qui luttait pour garder le dos droit et l’attitude noble et calme qu’on exigeait d’elle.

Un certain nombre de ces éternités se succédèrent avant que le reste de la famille ne commence aussi à montrer quelques signes de nervosité. Où donc était le fiancé ? On l’attendait pour dix heures, et il avait déjà une demi-heure de retard… La ponctualité n’était pas toujours un trait fort des Tholath, réputés pour se laisser facilement distraire par leurs expériences, ou quel que soit le domaine obscur de la science qui les absorbait présentement, mais pour une occasion si importante, tout de même… Cette entrevue était la seule et unique occasion pour les jeunes promis d’échanger quelques mots avant la cérémonie proprement dite. Onze heures sonnèrent, et toujours aucun signe du jeune homme. On envoya chez Thorkel un messager, qui trouva toute la famille en émoi : le futur époux était introuvable. Les Tholath se confondirent en excuses au nom de leur réfractaire rejeton, jurant sur tous les dieux qu’on le retrouverait à temps pour la cérémonie, dut-on aller le rechercher de l’Autre Côté. C’était une expression, bien sûr. L’indocile s’était probablement réfugié chez un ami, ou dans quelque cul de basse-fosse où l’on n’irait jamais le trouver.

Thorkel et sa femme se rendirent personnellement chez Gorvenel, où un copieux déjeuner fut servi afin d’apaiser les nerfs de tout le monde. On rirait bientôt de cette mésaventure, s’esclaffait-on pour masquer l’embarras. N’était-ce pas là un Tholath dans l’âme, jamais là où on l’attend ? Entre temps, Aisling avait réussi à se réfugier dans sa chambre et se réjouissait intérieurement de cet épisode, en dépit du chaos qu’il infligeait à sa demeure d’ordinaire si tranquille. Son fiancé s’était enfui ! C’était certain… Grand bien lui fasse ! Qu’il courre à l’autre bout du monde, si ça lui chante ! La certitude de cette désertion n’empêcha toutefois pas les femmes de chambre de revenir à la charge, armées de la lourde robe de mariée qu’elle devrait porter au soir. Mais, forte de ce nouvel espoir, Ash s’en accommoda avec plus d’insouciance.

On noua la crinoline puis la longue jupe, tira sur son corset jusqu’à lui couper le souffle, épinglant dentelles et fleurs dans l’arrangement compliqué de sa coiffure. La gouvernante n’avait de cesse de pincer durement ses joues, dans l’idée d’y apporter quelque rougeur, efforts bien vite recouverts par une couche de crème et un voile de poudre ocre. Même Solphax fut apprêté, à son grand dam, le doux velours de sa fourrure lavé et lissé par les petites mains expertes d’Asmo.

Il était près de seize heures lorsqu’enfin la torture s’acheva. Mais il fallait maintenant rejoindre le Palais de Justice pour la cérémonie, un bien inutile dérangement aux yeux d’Aisling, puisqu’il était désormais évident que son ex-futur-mari avait pris ses jambes à son cou. Aveuglés par ses espoirs futiles, Hershel en personne, le père de Gorvenel, vint s’assurer qu’on mènerait bien sa petite fille devant le clerc chargé de l’union, quelle que soit l’issue de cette journée.

Ash fut comprimée avec son père dans une voiture à cheval et emportée au petit trop vers sa destinée, qu’elle avait grand hâte de voir enfin achevée. Arrivée au Tribunal, il fallut encore attendre, seule avec Sol, dans une sorte de petite loge, mais la prévoyante jeune femme avait eu l’esprit d’emporter un livre afin de patienter jusqu’à ce que l’on se décide enfin à la ramener chez elle. La porte s’ouvrit enfin, et elle leva le nez de ses pages pour découvrir le visage sérieux d’Ayotunde dans l’entrebâillement.

— Il est arrivé. Ton fiancé est là. On va pouvoir commencer… Pose ton livre et viens avec moi, trésor.

Dans une rare démonstration de lèse-manuscrit, Aisling ne posa pas son livre, il lui tomba tout simplement des mains, tandis qu’elle considérait sa mère avec épouvante. C’était une erreur, il ne pouvait pas être là ! Quel idiot, il n’avait assurément pas pris la peine de fuir assez vite ou assez loin, et voilà qu’on l’avait sans doute rattrapé et traîné de force jusqu’au Palais de Justice, ou leur sort à tous deux serait définitivement scellé.

Blême et tremblante, incapable de vraiment croire ce qu’on lui annonçait, elle se leva et suivit sa mère comme dans un rêve, l’esprit vidé de toute pensée cohérente. Sol s’était lové contre sa nuque, elle pouvait sentir son apeurement dans les trémulations de ses ailes parcheminées, tour à tour ouvertes et repliées, écorchant par mégarde une épaule de ses griffes. Alors ça y est, pensa-t-elle, engourdie par une étrange sensation de détachement. Je vais me marier.
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MessageSujet: Re: Until Death Do Us Apart [Ensel]   Until Death Do Us Apart [Ensel] EmptyDim 13 Déc - 20:30

Until Death Do Us Apart

Marriage happens as with cages: the birds without despair to get in, and those within despair of getting out.


Lorsque mes yeux s'ouvrirent ce matin là, ce fut pour accueillir la douce luminosité d'un ciel d'azur où se prélassaient des nuages cotonneux. Je mis un bon moment à comprendre où je me trouvais, allongé à plat dos dans un fossé, les muscles endoloris et le front couvert de terre. Rilarelle s'était blottie dans le creux de mon épaule, sa longue queue entourant mon cou à la manière d'une écharpe, et j'entendais le bruit régulier de ses ronflements. Ce n'était pas la première fois que je me réveillais dans un endroit inconnu sans me rappeler de ce que j'avais fait la veille. Dans ces cas là en général, je préférais prendre mon temps pour analyser la situation afin de me protéger le plus vite et le plus efficacement possible des dangers éventuels. J'étais dans un fossé, très bien, je ne risquais pas de tomber plus bas. De plus, de hautes herbes me camouflaient à la vue des passants, comme dans un berceau de verdure. Pas de quoi craindre une attaque surprise, n'est ce pas ? Je décidai donc de me reposer encore un peu, d'autant plus que ma tête me semblait enfermée dans un étau si douloureux que je n'imaginais pas possible de réussir à me redresser sans qu'elle ne se brise en mille morceaux. L'inventeur de la gueule de bois était peut-être bien un Tholath.

J'avais dû sombrer dans un sommeil encore plus profond. J'ignorais quelle heure il pouvait bien être lorsque je sentis les petits mordillements de mon daemon contre mon oreille. « Réveille toi, Ensel, réveille toi vite ! ». Je protestai quelques mots inintelligibles, le visage enfoui dans un coussin d'herbe fraîche si doux et confortable. Au loin, j'entendais la voix colérique de mon père qui rugissait à en faire trembler le sol et j'en frissonnai dans mon demi-sommeil, me frottant les yeux. Rilarelle était en train de piétiner mon visage de ses pattes, sautillant sur ma tête avant de me tirer les cheveux. « Vite Ensel, vite ! Il arrive ! Il va écraser ton invention ! » Riri piaillait, visiblement paniquée, et je ne comprenais rien de ce qu'elle voulait me dire. Pourquoi mon père ferait une chose pareille ? J'étais très fier de ma dernière invention : un deux roues fonctionnant à l'énergie ambarique ! Les rugissements se rapprochaient, grimpant en intensité, alors que je me réveillais tout à fait, me rasseyant vivement pour émerger du fossé, mes cheveux ébouriffés entourant mon visage blafard. « Le train est là Ensel ! » Diantre ! Le vacarme était tel qu'il recouvrit les derniers mots du daemon alors que je plaquais mes deux mains contre mes oreilles. Je m'étais endormi près de la voie ferrée et ce que j'avais pris pour la voix de Thorkel Tholath n'était autre que le grondement d''une grosse locomotive à vapeur !

Je n'eus le temps que de bondir hors de mon fossé, Riri toujours perchée sur mon crâne, pour voir l'énorme monstre de métal qui crachait des volutes de fumée âcre. Le train siffla si fort que je cru qu'il m'avait percé les tympans, si bien que je sentais déjà les larmes de douleur affleurer dans mes yeux. Il était trop tard pour dégager la voie ferrée et l'impact fut d'une violence inouïe. Rilarelle avait raison, j'avais bel et bien laissé mon invention sur la voie et ce fut avec une stupeur mêlée de désespoir que je vis ma machine se faire écrabouiller par la locomotive qui tractait de lourds wagons de marchandises ! Ah quelle atrocité que de contempler une telle catastrophe !  Mais j'avais beau me mordre les doigts et me lamenter, je ne pouvais plus rien faire. Rilarelle gesticulait à coté de moi, couinant tristement, désolée de n'avoir pas réussi à me réveiller à temps. Je me souvenais vaguement de ma soirée de la veille, à présent. Je m'étais enivré avec des amis et ensuite, j'avais eu l'idée saugrenue de faire un tour en vélo jusque dans la vallée. Peut-être avais-je projeté de fuir vite et loin, dans un acte désespéré pour éviter ce fichu mariage…


« Par la poussière… le mariage ! »

Misère et damnation, c'était aujourd'hui et j'étais affreusement en retard ! Je m'avançai d'un pas comateux vers les restes de mon invention toute tordue, alors que le train s'éloignait. Le soleil se trouvait au dessus des montagnes à présent, j'apercevais ses rayons d'or faire scintiller les sommets enneigés. L'après midi était déjà bien entamée et je n'avais plus de machine pour rentrer. Jamais je n'arriverais à temps ! Sans Rilarelle, je me serais probablement recouché en boule dans mon fossé, pleurant sur mon sort et m'engouffrant dans les affres de la dépression totale. Mais le caractère enjoué et dynamique du petit sapajou la poussèrent à me remotiver. Me tirant par le bas de mon pantalon, elle bondit sur le vélo tordu et tenta de redresser le guidon avec ses petites pattes si frêles. Je ne pus m'empêcher de sourire en la voyant faire. « Tu pourras le réparer, j'en suis sûre ! Regarde, il est tombé sur de jolies fleurs sauvages, c'est un signe de chance. Il sera encore mieux qu'avant et tes parents seront très fier de toi. Il suffit de le pousser et le faire rouler jusqu'à la maison, viens ! » Lorsque je la rejoignis, je tendis la main pour lui permettre de grimper sur mon épaule, ce qu'elle fit, frottant son visage duveteux contre ma joue. « Moi je suis déjà très fière de toi. » Comment résister devant tant de chaleur et d'enthousiasme ? Je soupirai, ramassai le vélo et me mis en marche.

Rilarelle avait tenu à ce qu'on ramasse ces fameuses fleurs porte-bonheur, persuadée de leur pouvoir. De mon coté, j'étais plus que sceptique mais je les cueillis pour lui faire plaisir et les attacha à ma boutonnière. Tout en poussant ma machine en avançant cahin-caha sur le chemin caillouteux, je me représentais les différentes fins dramatiques auxquelles j'aurais pu prétendre en cette journée funeste. N'aurais-je pas pu m'étendre en travers de la voie ferrée et attendre l'issue fatale ? A moins que ne m'en aille plonger dans les eaux turquoises du lac que j'apercevais au centre de la vallée, me réfugiant dans l'oubli de ces eaux pour toujours. Ce fut donc dans un état d'esprit plus que pitoyable que je parvins dans la maison de ma mère, plusieurs heures plus tard. J'avais la sensation d'être à moitié mort quand je m'effondrai dans les bras de ma bonne, dont le daemon n'était autre qu'un gros Saint-Bernard. Il l'aida à me conduire à la salle d'eau, Rilarelle sur nos talons, tout en me houspillant de concert. J'avais manqué le rendez-vous avec ma fiancée, plus tôt dans l'après midi, et tout le monde m'attendait déjà au palais de justice !

Leopionne, ma vieille gouvernante m'avait élevé depuis ma naissance et je protestai d'une voix faible lorsqu'elle me déshabilla. Elle m'avait déjà vu nu mais tout de même, je n'avais plus cinq ans ! Trop épuisé et malade pour lutter, je ne pris pourtant pas la peine de protester plus que ça, la laissant me débarbouiller rapidement et m'habiller, comme si j'étais encore un petit garçon. Le daemon chien lui passait les vêtements que je devais endosser un à un, chemise, redingote sombre et cravate à jabot, pendant que Rilarelle coiffait ma chevelure ébouriffée avec ses petites pattes. L'avantage avec les cheveux bouclés c'est qu'on a pas besoin de les peigner. Tant mieux, ma pauvre tête n'aurait pas pu supporter un tel traitement. Une fois prêt, on me fit sortir et on me jeta dans une voiture déjà préparée à mon intention. Le cocher fouetta énergiquement ses cheveux. Nous étions très en retard mais était-ce la peine de rouler si vite ? J'avais atrocement mal au cœur. Je me retins pourtant héroïquement de vomir jusqu'au palais de justice où je fus soulagé de retrouver la terre ferme.

Lorsque je levai les yeux pour contempler l'imposant bâtiment de marbre, j'en eu le tournis et un nouveau haut le cœur me fit frémir. Mes parents étaient là, guettant mon arrivée devant l'entrée. Je m'approchai d'eux d'un pas lent, mon esprit entièrement concentré à m'empêcher de remettre sur les pieds de mon père. Il ne me fit pas le moindre commentaire mais son regard à lui seul était suffisant pour me transpercer le cœur au fer rouge. Ma mère glissa son bras sous le mien, embrassa ma joue et nous nous avançâmes à l'intérieur du palais.

Dans la grande salle aux sols recouverts de tapis somptueux, une foule impressionnante d'invités en habits de cérémonie étaient rassemblée. Je serrais les dents, la tête haute et la démarche noble, en dépit de mon teint blafard et des profondes cernes qui creusaient mon visage. Je reconnaissait parmi la foule les membres de la famille Tholath, mes sœurs aînées qui me souriaient en m'envoyant des signes de réconfort. Mon oncle Halvard et son épouse ainsi que tous mes cousins étaient présents également. Il y avait tant de monde, je reconnaissais, nos amis, nos collègues et aussi certains membres des autres hautes familles dont les Pirereth mais j'avais peine à reconnaître le visage amical de mon ami Danneth dans toute cette foule... Et puis bien-sûr, il y avait la famille de la mariée, les Balshilek, qui étaient là au grand complet. A mesure que j'avançais vers le devant de la salle où se trouvait une large table et deux chaises vides, je sentais la panique m'envahir totalement. Derrière la table se trouvait le responsable de cérémonie qui me fixa avec un sourire effrayant.

« Ah voilà enfin le fiancé ! Nous sommes heureux de vous voir, certains s'inquiétaient déjà hahaha ! On peut aller chercher la future mariée, je vous prie, nous allons pouvoir commencer ! »

Le sourire de cet homme me donnait l'impression qu'il n'était qu'un gros sadique me dévisageant comme on observe une bête à abattre. Accrochée à mon épaule, Rilarelle me serra plus fort  avant de se faufiler pour se glisser sous ma redingote et s'y cacher. Je la laissai faire et pris place sur ma chaise, soulagé de pouvoir enfin m'asseoir. Je n'avais absolument pas faim mais je me rendis compte que je n'avais rien mangé de consistant depuis plus de 48 heures et je me sentais désagréablement faible. Ma cuite, suivie de mes mésaventures champêtres, m'avait salement arrangé, c'était un fait. Un bref moment plus tard, la porte s'ouvrit et je n'osai me retourner pour regarder celle qui devait apparaître aux yeux de la foule, probablement revêtue d'une robe de prix pour cacher son infâme laideur ! La peur faisait battre mon cœur plus vite au point de m'en faire mal. Je me relevai par correction, toujours aussi droit, prenant une énorme inspiration pour tenir le coup. Le bruit d'un froissement d'étoffe me fit comprendre que ma fiancée était là, juste à mes cotés et au prix d'un énorme effort, je me tournai vers elle pour m'incliner légèrement en signe de salut.

« Bonsoir, mademoiselle, enchanté de vous rencontrer. Comment allez-vous ? Hum. Mademoiselle Tholath... Je m'appelle Ensel Balshilek. Oh attendez, c'est l'inverse !! Enfin bref…»

C'était tellement ridicule et pathétique de se présenter le jour même de son mariage que je ne pouvais empêcher l'accent un peu trop ironique de mes mots. Mais par la suite, je me sentis tellement troublé et confus que je m'embrouillai. Le fait de découvrir son visage en levant enfin les yeux vers elle m'avait complètement décontenancé. Je ne l'imaginais tellement pas comme ça ! Elle était… belle. Son visage était très étrangement basané et je me souvenais tout à coup de l'origine de sa mère, venue d'un pays si lointain et mystérieux. Elle était gracieuse néanmoins, son visage était harmonieux et sa taille assez haute. Avait-elle réellement les dents comme celles d'une jument comme me l'avait assuré mon ami Jibus ? Il semblait que non. Elle était svelte, délicate et charmante, ce qui me surprenait énormément. Pendant que je la dévisageais, je me rendis soudainement compte que je lui avais fait faux bond cet après midi et qu'il était donc très possible qu'elle m'en veuille atrocement. Allait-elle me faire une scène en public ? Se mettre à m'insulter et à me gifler au moment où je m'y attendrais le moins ? Vouloir me tuer ? Le vrai problème venait-il de son caractère de dragon, ainsi caricaturé de manière imagée par mes amis ? Tout à mes questionnements internes, j'écoutais à peine l'employé du tribunal qui s'était lancé dans un discours aussi long qu'affolant, tandis que nous restions debout, l'un devant l'autre, épié par toute cette foule.

« Je suis heureux de vous accueillir, mesdames et messieurs, dans notre beau tribunal afin de célébrer l'union de Ainsling Balshilek et Ensel Tholath. En tant qu'officier de l'état civil, c'est toujours avec honneur et plaisir que je reçois les futurs époux qui ont choisi la voie de l'engagement mutuel. Blablabla l'attention quotidienne que vous lui apporterez, blabla respect réciproque, blabla une assistance de chaque jour blablabla relation de fidélité. Bla, bla et bla ! »

Je sentis mes jambes vaciller dangereusement alors que je me forçais à conserver un air tout à fait impassible, le visage lisse, le regard dirigé vers le brave homme qui nous dispensait tous ces horribles et monstrueux conseils. Je poussais même le vice à hocher la tête de temps à autre en signe d'accord alors que je n'écoutais à moitié rien, mon esprit totalement perdu dans les méandres de l'angoisse.

« Blabla...pour y planter votre amour et le voir s'épanouir .. blabla »

J'avais envie de pleurer et pourtant je me contraignais à rester tout aussi imperturbable. Rilarelle, par contre,  restait cachée dans la large poche intérieure de ma redingote et refusait obstinément d'en sortir. Parfois, on voyait son œil apparaître entre les pans de mon habit tandis qu'elle épiait avec grande méfiance ce drôle de daemon qui était lové contre la nuque de la future mariée. De mon coté, un doute affreux me submergea tout à coup. N'était-ce pas moi qui devais apporter les alliances ? Je ne les avais pas. Tout ce que je possédais au fond de ma poche, c'était les petites fleurs porte-bonheur de Rilarelle...

«Pour conclure, je tiens à vous féliciter chaleureusement et à vous souhaiter une longue et heureuse route commune. Je remercie également tous les assistants pour leur présence significative. Nous allons à présent procéder au volet administratif du mariage de mademoiselle Aisling Balshilek et monsieur Ensel Tholath. »

Avant toute question directe, je sortis les fleurs un peu flétries de ma poche, les tendant à ma future femme d'un geste assuré. L’œil farouche, le dos droit, j'offrais à ma voix une fausse gravité très solennelle, comme dans une pièce de théâtre dramatique.

«Je vous arrête tout de suite, qu'on ne me parle surtout pas d'alliances ! J'ai eu un rêve prémonitoire. Il m'a été révélé d'offrir ces fleurs porte-bonheur à ma fiancée à la place d'un anneau. Raison de mon retard, j'ai pris soin d'aller les ramasser moi-même dans la vallée. »

Parfois, plus le culot est grand, plus on n'ose pas le contrarier. Et j'avais le droit d'être superstitieux, voilà tout.

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